Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
13 avril 2015 1 13 /04 /avril /2015 16:19

Cette semaine c’est les 40 ans de Fluide glacial, et pour fêter cela plusieurs événements se déroulent en ville dans le cadre d’un festival littéraire bien connu par ici. Il y a quelques stands sous chapiteau, des séances de dédicaces ici et là, et une expo mettant en scène l’œuvre du célèbre mensuel rigolo au cœur de l’école des beaux-arts de Metz.

Il se trouve que le type en charge de l’expo est un proche et en tant que tel je me dois de prendre des nouvelles de lui lorsque l’occasion s’en fait sentir. Avant d’aller plus loin et pour plus de discrétion par rapport mon ami j’opterai pour l’anonymat et le prénommerai Raije. Comme l’après-midi est belle, la température clémente, j'espère secrètement que Raije m’avoue son désespoir d’être seul et à la merci d’un ennui profond. Sans réelle motivation je redouble d’ardeur pour composer son numéro sur l'écran de mon téléphone portable.

Je tremble un peu et mon cœur bat lorsqu’après une demi-sonnerie il consent enfin à me répondre.

Je lui demande : Ca va ?

Il me dit : Bof.

Je raccroche et m'empresse d'équiper ma valise de premiers secours. Je vous la décris.

C’est une malette rigide noire format 30 x 40. A l’intérieure se tiennent au garde à vous 2 bouteilles de Château Boucassé 2009 et 2 verres à pied d’une sérieuse contenance, soit 40 cl. Dans la pochette intérieure on peut trouver une planche à découper en bois de 25 x 15 et un couteau aiguisé prêt à découper n’importe quel truc à base de cochon, ce qui tombe vraiment bien puisqu’à cela vient s’ajouter un superbe et non pas moins délicieux saucisson de presque 35 cm.

En moins de huit minutes je suis sur le lieu du sinistre. Je débouche une quille et administre les premiers soins. Les résultats sont probants. Il va mieux. Les couleurs qui apparaissent sur son visage sont de nature à me rassurer. Mais le temps file à une vitesse folle. Je jette un œil en direction de Raije et je constate qu’il est à présent complètement réparé lorsque je l’entends me dire : Allons manger !

Pourquoi pas, allons faire ça, dis-je. Deux options s’offrent à nous. La première, est une table bourgeoise dans un resto surfait du centre-ville, la seconde, est le catering de la soirée organisée par Fluide glacial aux Trinitaires. Notre choix se porte sans mal sur la seconde possibilité. Nous arrivons back stage et tentons de nous désaltérer à l’aide de quelques bières mais cela ne donne aucun résultat satisfaisant donc je dégaine la deuxième quille de mon infirmerie portative. Vraiment, le raisin est un remède miraculeux puisque nos sourires niais le prouvent. A peine à deux pas, se déroule le spectacle où rock’n roll et dessins se côtoient sur la même scène. Raije et moi partageons un sentiment commun puisqu'on se dit qu’il serait intéressant de s’en approcher afin de découvrir ce happening, et pourquoi-pas, y participer. L’accès à la scène se fait par une porte nous étant totalement accessible alors nous nous faufilons. Nous sommes à un mètre de la scène sur la quelle joue un musicien très excité devant un parterre de gens serrés comme des sardines. Cette soirée à l’air de marcher du tonnerre. De part et d’autre du plateau sont installées deux tables à dessin derrières lesquelles se défoulent les dessinateurs de Fluide glacial. Au milieu, juste là, derrière le chanteur, comme en suspension, un splendide canoë-kayak gonflable de couleur orange. Raije et moi sommes intrigués à la vue ce décors étrange alors on s’en approche pour comprendre le rôle de cet objet posé au centre de ce spectacle étonnant. Et comme notre médicament à base de fruits n’en peut plus de faire son effet on ne se rend pas vraiment compte que nous sommes effectivement sur scène et que nous faisons, bien malgré nous, à présent partie intégrante du spectacle. Je m’avance et du bout de l’index m’assure qu’il s’agit bien là de ce que l’on pense. Comme on ne pense à rien de précis, Raige s’assure que l’objet gonflable n’est pas fixé à son socle. Nous sommes très à l’aise à ce moment précis puisque nous répondons aux cris de la foule par des vociférations presque animales et des gestes incohérents, et cela commencent à inquiéter sérieusement le pompier en faction à notre gauche qui se demande si oui ou non ces deux individus ridicules que nous sommes ont un rôle à jouer dans la mise en scène de la soirée. Nous remarquons nos tremblements et on se dit qu’il est à présent plus que temps de faire un truc dingue avec ce putain de bateau. Et sachez bien que parfois la communication sait se passer de mots, de codes, ou de gestes et se contente uniquement de l’instant. Alors dans un rire puérile qui nous ramène à nos huit ans et demi nous nous emparons avec détermination de l’embarcation, et dans un élan frénétique nous le balançons sans aucune retenue sur la marée humaine subjuguée, et sans plus attendre nous courons le plus vite possible comme des gamins sur la plage pour, enfin, bondir et nous jeter à l’eau pour attraper ce fichu bateau. Raije réussit à gagner le canoë et moi non. Je flotte à la surface humaine et je réussis à garder la tête hors de l’eau quelques secondes avant de boire la tasse et couler par deux mètres de fond. A cet instant je ne vois plus mon copain mais je m’en fiche car je viens de faire le plus beau des plongeons de toute mon existence et mon univers sous-marin est fait de lumières, de cris, je respire à peine et pourtant je suis vivant plus que jamais, je vois, en haut à la surface, des visages, des bras, des dizaines de mains bougeant, ondulant comme des vagues au rythme de la guitare saturée et quasiment sourde résonnant jusque dans le fond de mon ventre. J’ai soudain peur de ne plus pouvoir respirer alors d’autres mains m’agrippent et me ramènent à la vie. Je tente maintenant de gagner le rivage, je l’aperçois, les gens me poussent, ils me projettent et me renvoient enfin jusqu'à la scène. Je reprends mes esprits pendant deux ou trois secondes et je jette un œil à droite, le pompier consulte son petit manuel « J’apprends à gérer les situations d’urgence » mais il se rend vite compte que rien nous concernant n’y est mentionné. Il respire par saccades. Je regarde à gauche et je vois Raije qui, lui aussi, a été sauvé par le public, je sais qu’il va bien puisqu’il n’a pas lâché son cigare encore fumant. Notre embarcation quant à elle est emportée par les vagues humaines d’une foule à présent galvanisé par notre tentative de jeux aquatiques. Nous avons un réflexe commun, sans doute le respect du public, nous hurlons quelques onomatopées imprécises qui vont se perdent dans la foule et nous décidons de disparaitre maintenant. Nous regagnons le back stage et le confort mou d’un canapé plutôt accueillant pour savourer les joies de notre petite escapade en terre inconnue en se disant que bon sang, il y a des fois, c’est quand même pas croyable ma bonne dame etc…

Oui, il y a des fois, des jours, des après midi où l’ennuie nous tue, il ne se passe rien ou si peu, on se dit même qu’il ne peut plus rien arriver de bon et qu’on ferait sans doute mieux de s’en remettre à l’esprit casanier. Mais, c’est sans compter sur ce coquin de sort. Celui-là même qui parfois heureusement bien inspiré, vous colle entre les mains les meilleurs arguments pour mener à bien l’entreprise gamine et au combien vitale de la franche rigolade.

Partager cet article
Repost0
23 mars 2015 1 23 /03 /mars /2015 22:36

Cet après midi nous avons la visite de la dame de l’INSEE. Elle est très bien, elle nous pose des questions sur notre appartement, sur le loyer, les charges, sur les conditions de ceci, de cela, de mon cul sur la commode, et tout se passe pour le mieux, et l’enquête enfin se termine. Là, on discute de tout et de rien et, j’ignore pourquoi, quelque chose se passe. Quelque chose de pas ordinaire. Quelque chose qui se transforme en truc qu'on a envie d'écrire et partager. La madame, jusqu’ici complètement normale, se mue en une sorte d’attraction de fête foraine en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. Tout cela grâce, ou devrais-je dire à cause, d’une virgule mal intentionnée. Et refermant son dossier sans joie, la voilà qu’elle dégaine cette réplique aussi surprenante que soudaine : « J’ai encore un rendez-vous à 16h00, mais avant cela je vais rentrer parce que j’ai une petite chatte,…(inspiration, puis expiration, certainement sous l’effet de la fatigue ou je ne sais quoi, puis…) et elle va mettre des petits au monde. »

Bien entendu je ravale des trucs dans le fond de ma gorge du genre salive quasiment sèche et j’essaye de rester digne en pensant à l’étroitesse de la chose qui ne me regarde pas et bien-sûr après cela, la messe est dite. Je vois l’INSEE, le gouvernement, mon devoir civique, ma condition de citoyen, et… la chatte de la dame qui vient de nous sonder mon épouse et moi. C’est à ce moment précis que je me rends compte de l'importance du détail grammatical. Je me dis vite fait, notamment au sujet de la ponctuation, qu’il ne faut surtout pas prendre cela à la légère, car si cette putain de virgule avait été placé au bon endroit cette phrase sans pudeur aurait ressemblé à quelque chose comme : « J’ai encore un rendez-vous à 16h00, mais avant je vais rentrer, (virgule bien placée) parce que j’ai une petite chatte et elle va mettre des petits au monde. » Mais soyons honnêtes, si cette virgule n’avait pas dérapé de quelques centimètres je n’aurais sans doute pas eu l’occasion de vous parler de la dame de l’INSEE, de sa chatte, et de ses petits. Et cela aurait été bien dommage.

Partager cet article
Repost0
5 mars 2015 4 05 /03 /mars /2015 15:49

Un type passe en vélo juste à côté de moi. Il est seul, il pédale et il hurle ça : "J'veux pas de femme chez moi ! J'veux même pas un chat !"

Partager cet article
Repost0
5 mars 2015 4 05 /03 /mars /2015 15:46

Aujourd’hui je traverse la rue. En posant le pied sur le trottoir d’en face un type est là, planté comme un cierge. L’air de rien il ne me donne pas du tout envie de lui demander l’heure, pourtant il semble presque impatient de me voir arriver à sa hauteur. Il me toise d’un regard pas mal approximatif et m’apostrophe dans un français désarticulé : « Tarte au fromage ! » me dit-il.

Bon OK ! Je marchais peut être un peu vite, c’est vrai que je n’avais sans doute pas été assez souriant envers mes congénères ce matin, je reconnais également avoir rechigné à l’idée d’emboiter le pas d’une splendide journée de travail, mais de là à se voir proprement vilipender d’une telle logorrhée pâtissière, là je dis bon sang il y a tout de même des journées qui valent le coup !

Partager cet article
Repost0
11 mars 2014 2 11 /03 /mars /2014 08:57

Ca y est ! J’ai démissionné ! Et ce n’était pas trop tôt ! Depuis le temps que j’y pensais, j’ai enfin franchi le pas. Bien-sûr, tout n’a pas été simple, il ne faut pas croire que c’est facile d’entreprendre une telle démarche. J’ai pesé le pour, le contre, j’ai essayé de me projeter dans l’avenir à plus ou moins long terme, d’évaluer les conséquences pour moi, ma famille. Et surtout, je me suis posé LA question : Pourrais-je encore me regarder dans une glace après ça ?...

Mais je vous sens inquiet. Il ne faut pas. Je vous assure que je vais bien, et d’autant bien qu’enfin je me sens débarrassé de ce poids tellement lourd, de cette oppressante responsabilité de citoyen anonyme. Pourtant j’avais tout bien fait. Tout comme il fallait, et depuis toujours. Enfin, au moins depuis l’âge de mes 18 ans. Je m’en souviens comme si c’était hier, le 24 avril 1988, j’avais voté Tonton et je n’étais pas peu fier d’avoir rempli mon devoir civique, car, cerise sur le gâteau, j’avais été partie prenante dans la victoire de notre poulain. Tu parles d’une fierté ! J’en ai encore la chair de poule. Alors, depuis cette victoire j’ai toujours voté, municipales, législatives, européennes, j’ai toujours pris le temps d’aller aux urnes puisque cette démarche était une évidence. Et si je ne votais pas pour un ou une candidate préférée, au moins je votais contre le front national, ce qui n’était déjà pas si mal. Mais, chemin faisant, les choses ont changées, le paysage politique a évolué, et s'est enlisé dans une sorte cloaque nauséabond au sein duquel nos élus s'évertuent à patauger et à s’éclabousser, où le croche pied est devenu le passe-temps favori. Le paysage politique est à présent un petit monde à part, un genre de spectacle dégoutant, joué par des acteurs d’une laideur sans limite.

Aujourd’hui je regarde cela avec beaucoup de tristesse et de colère. Tous ces hommes et femmes qui me sourient dans le seul but de conquérir ma voix à la prochaine échéance me répugnent, ils me navrent, et j’ai envie de leur dire à quel point je les déteste. A quel point je me sens trahi, et à quel point ils ont tout perdu. Et aujourd’hui ils vont aller se faire foutre car je les emmerde. Oui ! Je vous emmerde messieurs et mesdames de la vie politique, je vous emmerde comme vous le faites si bien en manquant de respect à l’ensemble de vos concitoyens. Sachez que d’autres, tout comme moi, brûleront leur carte d’électeur parce que vous n’êtes plus digne de rien. Alors bien-sûr je vous entends déjà me dire oui mais c’est de votre faute si le front national et patati et patata, je vous interdis de me désigner responsable de quoi que ce soit, VOUS êtes responsables de notre désaffection envers la politique, vous seuls êtes responsables de ce qui vous arrive.  

Aujourd’hui la politique est devenue une insulte faites au civisme et c’est la raison pour laquelle je démissionne de mon rôle de citoyen anonyme et responsable. Je sais qu’en faisant cela, au moins, j’impacte concrètement sur l’évolution de notre société, et je sais que mon non-vote est le geste politique le plus juste qu’il m’est été donné de faire depuis longtemps. Alors je vous le dis, envoyez vous aussi un message fort, et ne votez plus.  

 

La politique ne trouvera son salut que dans sa propre fin. Point.  

Partager cet article
Repost0
9 mars 2014 7 09 /03 /mars /2014 13:33

Nous sommes le 4 mai 2003. Il est exactement 19h53 et au moment où je m’apprête en engloutir cette merveilleuse part de tarte aux pommes, quelque chose semble vouloir m’empêcher d’apprécier à sa juste valeur ce moment délicat de gourmandise complètement égoïste. Ce quelque chose s’adressant directement à mes narines me fait vite comprendre qu’il s’agit d’un message odorant de Bouboulette notre chat noir et con, qui une fois de plus vient soulager son appareil digestif sous notre nez au moment le moins approprié. Antoine, de son côté n’a que 3 ans et demi mais devine bien que l’odeur de la tarte aux pommes ne doit rien n’avoir de commun avec ce que notre appareil olfactif est en train de subir, et me dit : Elle sent pas bon la tarte. Je lui fais alors remarquer que ce qui décore de cette manière imprévue l’atmosphère de notre petit nid douillet ce n’est pas la tarte aux pommes mais bien ce qui est en train de sortir du cul de Bouboulette.

Je laisse tomber mon plaisir égoïste et m’engage dans une impérative corvée de nettoyage afin que nous puissions terminer ce repas dans les meilleures conditions. Mais je peste et je maudis ce chat semblant n’avoir d’autres projets que celui de pourrir une fois de plus notre intimité familiale. Cet animal me rend fou, et il y a de quoi.

Parfois, la réjouissance du partage d’une simple tarte aux pommes peut sembler anodine et pourtant elle apparaît comme essentielle quand elle nous ramène au plaisir enfantin, à la promesse régressive d’une gourmandise et ça nous fait du bien. Alors, tout bien pesé, le fait de voir ces délicieux instants interrompus par une entreprise fécale malodorante commanditée par un félin aux manières douteuses et aux intensions scélérates me fait dire qu’ici et maintenant il n’y a rien au monde que je déteste plus que ce putain de chat venant de me volé mes souvenirs d’enfant.

Et je suis déçu bien entendu, car je vais aller me coucher avec ce sentiment amer, celui-là même que je ressentais, alors enfant, lorsqu’en guise de punition on me privait de dessert. Et déçu également car Antoine, notre petit garçon de 3 ans et demi, restera désormais sur l’idée bien décevante qu’une tarte aux pommes a forcément une odeur de chiottes. Bon.

 

Je suis profondément endormi et sans doute rêve-je à des images rassurantes et bienfaisantes où des substances molles et tièdes m’enveloppent dans une infinie douceur, je suis tellement bien, je suis au creux de mon sommeil et je crois que je suis du coton, alors je n’ai rien à craindre puisque tout cela me rassure et je n’ai aucune raison de craindre non plus cette chose semblant vouloir se poser à mes pieds, et qui ne ressemble pas trop à du coton, cette chose me fait douter de la réalité de mon rêve et me force à interpréter cela comme étant une sorte d’agression venant du monde normal des gens qui ne dorment pas du tout, alors je me réveille en surface et comme il est 4 heures du matin il fait nuit et je me dis, dans un demi sommeil, que c’est quand même pas de veine de se faire réveiller en plein milieu d’un rêve aussi agréable que celui dans lequel je m'ébattais encore dix secondes auparavant. Malgré ma bouche pâteuse et la lourdeur de mes paupières compromettant toutes tentatives de perception visuelle, je comprends à moitié, mais suffisamment, que le poids mort sur mes pieds engourdis est celui d'un chat. Ou plus exactement du chat qui m’a volé mon dessert la veille au soir. Qu’il soit maudit ce petit fumier, me dis-je. Je n’avais déjà pas apprécié qu’il me retire le pain de la bouche à l’heure du dessert, et là, je n'aime carrément pas qu'il vienne m’extirper de mon sommeil salvateur. Cette enflure de chat à la noix ne va pas s’en tirer comme ça et loin de moi l’idée de lui faire une place de choix dans le creux de mes pieds délicats et enveloppés de l’épaisseur réconfortante de notre couette conjugale en plume d’oies. C’est pourquoi, d’un mouvement bien décidé à ne souffrir aucune résistance, je déplie mes deux jambes en guise de catapulte pour me débarrasser sur le champs de Bouboulette. Mais une chose étrange vient me tirer complétement et définitivement de mon sommeil. Le bruit d’impact sourd et lourd dû à l’atterrissage de l’animal sur le sol ne correspond en rien à l’idée que je me fais de celui d’une boule de poils d’à peine trois kilos tombant de notre lit. Inquiet, j’allume la lampe de chevet et tout en me redressant, j’ouvre enfin mes yeux et je vois au bout du lit et un de mes pieds dépasser de la couette, je vois aussi dans le coin opposé de notre chambre le fauteuil en velours rouge dans lequel Bouboulette est enfoncée, et à entendre ses ronronnements il est plus qu’évident qu’elle doit dormir profondément, et depuis longtemps. Et je sens quelque chose agripper mon gros orteil. Une main peut être. Oui, une main d’enfant de trois ans et demi dans le prolongement de laquelle apparaît le visage d’Antoine offrant un regard ma foi tout à fait stupéfait et un tantinet interrogateur. Je regarde mon petit Antoine et je comprends que je viens de catapulter mon propre enfant. Daniela se réveille, regarde Antoine, me regarde, et me demande pourquoi je viens de coller un coup de pied à ce petit bonhomme. Ce à quoi je réponds que ce n’est pas Antoine mais Bouboulette que je visais. Suite à quoi le chat me jette un regard de merde et me dit miaou. J’aide Antoine à nous rejoindre entre nous deux et j’essaye tant bien que mal de retourner à mes histoires de coton tièdes, de tucs mous, rassurants, et bienfaisants, en me disant que les chats, bon sang, ça fait vraiment trop de mal aux enfants.

 

 

Partager cet article
Repost0
28 février 2014 5 28 /02 /février /2014 10:54

Mardi 28 février 2015, au numéro 3 de la rue du Cottage à Metz. Il est exactement 7h34 et Zézé est le premier au point de rendez-vous. Il réajuste sa casquette et jette un œil en direction de la rue Beausoleil, aperçoit Mitch et Babeuch arrivant d’un pas plus qu’incertain mais vu l’heure tardive de la fin du démontage de la veille il est tout à fait aisé de comprendre la fatigue et l’enthousiasme mou des 2 bonhommes. Il faut dire, question montages et des démontages, ces trois-là savent de quoi ils parlent. Les flights, les ponts, les semis à décharger et à recharger, ça fait vingt ans qu’ils en mangent, et être road, pour eux ce n’est plus un travail mais presque un sacerdoce. Zézé est content de retrouver ses 2 compagnons et nos deux retardataires sont contents de retrouver Zézé. En fait ces trois-là sont toujours très content de se retrouver. L’heure du get in est fixée à 8h00. Le régisseur est déjà là bien-sûr, elle s’appelle Mme Breugnière, elle a 56 ans, et elle est directrice de l’école maternelle de la Moineaudière depuis 1996. Mme Breugnière est plus que ravie d’accueillir quelques intermittents ce matin. C’est grâce au projet ambitieux de Mme Ségolène Royale visant à faire descendre la culture dans les écoles, que le programme «La culture c’est aussi pour les gens » a permis à Mitch, Zézé, et Babeuch d’être là ce matin. C’est la classe des petits, moyenne section, qui a été sélectionnée aujourd’hui, et à voir les yeux émerveillés de tous ces enfants on imagine l’émotion dans le cœur sensible, et sur les visages de nos trois intermittents (Moi, je les connais bien tous les trois, et je vois bien leur visage avec plein d’émotion dessus). Mais l’excitation doit faire place au professionnalisme et sous l’impulsion de Mitch, désigné tout naturellement chef d’équipe, la démonstration peut enfin commencer.

 

     - Babeuch ! Tu prends les 4 premières rangées de chaises et tu me les colles au fond, pour qu’elles ne gênent pas. Zézé ! les tables qui sont de ton côté, tu me les fous dans la cours.

      - Babeuch tu viens avec moi, on prend l’armoire, on va la foutre dehors.  

 

Tous les enfants regardent avec éblouissement la culture se dérouler sous leurs yeux candides et cela est vraiment très touchant. Mme Breugnière est fière d’avoir été choisie pour accueillir ce fleuron de notre exception culturelle. Après 2 heures d’agitation intense, les chaises sont toutes en place, les tables sont rassemblées sont sous le préau, l’armoire est dans le couloir, le tableau noir est décroché, 4 ponts sont installés au plafond et supportent 12 PAR chacun et 2 grappes de son, les pendrions occultent les fenêtres, 4 sub reposent au sol, les pratos sont en place, les crash-barrières sont ajustés au millimètre, le marley est déroulé, la salle de classe ne ressemble plus du tout à une salle de classe, deux ou trois enfants pleurent et Zézé demande très justement à Mme Breugnière où se trouve le catering car il a soif, et Babeuch se tourne alors vers Mitch pour lui faire comprendre que Zézé a soif, et Mitch se tourne vers les enfants et d’une voix défiant toutes les lois de la physique leur chante une petite chanson, et du coup quatre enfants de plus se mettent à pleurer, alors Babeuch cherche le régisseur et lui demande s’il est prévu qu’ils restent manger à midi, mais Mme breugnière lui tend un carnet de correspondance, Babeuch du coup perd son sens de l’humour et décide de parler anglais à son talky-walky, mais les enfants pleurent toujours alors ce n’est pas supportable, mais Zézé prend ça avec beaucoup de philosophie et préfère se dire que bon sang c’est une journée vraiment extraordinaire, mais Mme Breugnière est inquiète, visiblement la culture lui échappe drôlement, elle qui se réjouissait de voir un joli spectacle ce matin, on peut dire qu’elle est servie, et Mitch se dit qu’il s’humecterait bien la glotte alors il me téléphone, et comme je soutiens à mort le régime des intermittents, je ne lâche pas l’affaire, là-dessus je joue mon vatout et dégaine un cubitainer de blanc que je me félicite de faire livrer au plus vite, alors malgré les cris des enfants, les chansons de Mitch, Zézé qui réfléchit, et la gorge sèche de Babeuch, un bruit de moteur au gaz se fait entendre et Mme Breugnière est inquiète, je la comprends, et elle ouvre la fenêtre donnant sur la cours, et la magie opère puisque Rickie, dans un geste somptueux, fait lever les fourches de son Fen’ et vient déposer juste là, au nez et à la barbe du système, le chardonnay tant mérité et évidemment bien trop tiède.

Quel spectacle ! Quelle beauté ! Quelle intensité ! La culture c’est beau, surtout quand c’est très bien fait. Faire descendre la culture dans les salles de classes c’était une idée comme une autre, mais vu comme ça c’est un véritable coup de génie !

 

Alors vive Ségolène ! Vive les écoles ! Vive les vieux ! Et Vive les intermittents !

Partager cet article
Repost0
14 février 2014 5 14 /02 /février /2014 16:07

C’est aujourd’hui le grand départ. Daniela va bientôt retrouver son pays après neuf longues années passées loin de sa Bulgarie natale. Nous sommes mercredi matin il est 9h15 et on sent une sorte d’excitation toute naturelle chez Daniela qui n’en peut plus d’attendre le moment où elle décollera enfin à destination de Sofia. Ce voyage est en quelque sorte son cadeau d’anniversaire offert une semaine auparavant, et depuis ce jour mon épouse n’est plus tout à fait la même. Oui, car je l’ai surprise plusieurs fois en train de chanter, crier, sauter, ou encore plus étrange, écouter des chansons la faisant pleurer à chaudes larmes, puis écouter de nouveau cette même chanson qui, à nouveau, la fait pleurer, et encore et encore… Je lui ai bien-sûr demandé pourquoi était-elle triste, ce à quoi elle m’a répondu que non elle n’était pas triste, mais la chanson l’était et que ça la rendait heureuse. Bon.

L’aéroport se trouve à Frankfort-Hann, soit à 180 km de notre point de départ. Sachant qu’il nous faudra environ 2 heures de route, que le départ est prévu à 14h20, et que nous ne connaissons pas du tout cet endroit, j’estime donc l’heure de départ de notre domicile à 11h00 et mon pouls est à 70 bpm. Il est 10h15 et je demande à Daniela si toutes ses affaires sont prêtes. Elle me répond que oui, mis à part quelques bricoles sans importance. Je tente alors de faire pénétrer ces quelques bricoles sans importance à l’intérieur de la valise gonflée à bloc, prête à péter à tout moment mais j’y parviens avec l’aide de multiples outils plus ou moins adéquats, suite à quoi je finis par ranger le marteau et le pied de biche qui ne me serviront plus une fois la valise chargée dans le coffre de la voiture. Il est 11h02 et j’annonce l’imminence du départ à Daniela qui me répond qu’elle est quasiment prête. Ce qui signifie en langage masculin qu’il lui reste deux yeux et une bouche à maquiller, des cheveux à coiffer et une robe à passer. Mon pouls est à 85 bpm alors je m’assoie et je fais semblant de rire, alors Daniela me demande pourquoi je ris, et je réponds que je suis détendu parce que je n’ai même pas peur. Il est 11h34 et j’insiste sur le fait qu’il serait dommage de voir l’avion partir sans elle et Daniela me répond qu’elle est prête. Elle me dit cela assise sur le rebord de la baignoire en terminant la mise en beauté de son œil gauche, et je lui fais remarquer très justement qu’outre le fait qu’elle soit déjà prête elle ferait quand même bien de décorer son œil droit et de s’habiller avant de prendre la route, alors je respire et prends mon pouls qui lui me réponds « 97’». Je prends ça avec philosophie et je m’assois par terre et je me mange un ongle ou deux. Il est 11h55 et avant que je puisse penser que tout est perdu, Daniela apparaît coiffée, habillée, maquillée, et me dit « Ben alors ! On y va ?! » Je décide finalement de reprendre une respiration normale afin d’éviter l’hyperventilation ce qui ramènera fort heureusement mon pouls à 108 bpm.

La voiture nous emmène jusqu’à l’aéroport sans trop de difficultés puisque nous arrivons en excellente santé. Il est 14h01. Je me dis que nous avons une chance folle puisque nous avons 19 minutes devant nous et un pouls à 126 bpm. Nous trouvons le comptoir de la compagnie aérienne plutôt rapidement et comme nous sommes les derniers il n’y a même pas de file d’attente, alors nous disons bonjour à la dame qui nous demande le passeport de Daniela, et nous lui adressons un titre de séjour français, alors la dame nous fait un signe de tête que nous prenons pour un « non » et nous explique qu’elle vient de nous demander un passeport et non un titre de séjour, et comme il est 14h07 mon pouls me prévient qu’il passe la barre des 130 bpm, et nous expliquons à la dame qui veut voir un passeport qu’on va lui en donner un qui n’est plus valable depuis 2009, et la dame ne comprend pas pourquoi ce choix de notre part, nous lui expliquons que nous lui aurions bien refiler une pièce d’identité bulgare mais comme celle-ci est à une DLC allant jusque juin 2006 on est quasiment sûr que ça ne fera pas l’affaire, j’ajoute que nous disposons aussi de quelques cartes vital en cours de validité mais elle n’esquisse même pas un sourire. La dame ne veut plus nous parler alors du coup elle se met à parler en Allemand dans un téléphone de couleur, et je fais remarquer à Daniela que le temps file à une vitesse dingue puisqu’il est déjà 14h12, mais la dame nous indique presque poliment que nous devons rejoindre le poste de police situé là-bas, au bout à droite, puis au premier étage, et qu’elle garde notre valise, et qu’on ferait mieux de se dépêcher, ce à quoi je réponds « 144 bpm ».

Nous sommes au bureau de police et c’est une autre madame qui nous accueil par un « guten tag » truculent. Je veux lui dire qu’elle ferait mieux de la fermer, putain de bordel de merde, que ma femme a un putain d’avion à prendre et qu’il nous reste moins de 10 minutes, alors qu’elle se sorte les doigts du cul, mais en fait je lui dis… « Bonjour ». Nous comprenons vite qu’elle ne comprend rien à notre histoire en français, et je revois Mr Lalevée mon professeur d’allemand en 4e au collège Paul Verlaine me disant qu’un jour viendrais où je regretterais sûrement mon comportement puérile et mes résultats frôlant le moins que zéro, alors je tente un anglais approximatif mais la madame nous fait comprendre que notre échange se fera en langage des signes allemand ou ne se fera pas. Nous acceptons car il est 14h18. Elle aussi entreprend de parler en allemand dans un téléphone, décidément c’est une manie dans ce pays, elle comprend alors qui nous sommes, pourquoi on est là, et ce qu’elle doit être en mesure de faire pour que Daniela puisse prendre l’avion à 14h20. Mais comme elle commence à sourire et à se détendre à partir de 14h22 nous sommes en droit d’être inquiets quant à la probabilité d’embarquer à bord du vol A458 B12 de la compagnie Wizzair dont tous les passagers sont tous assis à leur place, tous sauf Daniela Ivanova, détenue par la bundespolizei qui, par les compétences de la bundesmadame, doit nous fournir un bundes-laisser-passer permettant à Daniela le passage de la bundes-douane et enfin s’assoir confortablement sur le siège 48 C.

 

Nous nous délestons de la modique somme de 25 euros afin de payer la taxe de laisser-passer et la madame remplis la petite carte avec beaucoup d’application et d’implication, peut-être trop puisqu’à 14h28 Daniela me fait remarquer que je n’ai plus le sens de l’humour car en l’absence de photo d’identité, la bundesmadame s’est mise à dessiner au stylo le portrait de mon épouse, suite à quoi j’ose un demi-sourire motivé davantage par mon record de pulsations à 198 bpm que par le concours de dessin improvisé sur le bureau de la bundes-madame. Le laisser-passer nous est enfin remis à 14h34 et nous descendons les escaliers en courant, nous nous dirigeons vers la porte d’embarquement en courant, nous courons en courant, nous arrivons enfin devant un monsieur qui ne parle pas allemand dans un téléphone, ce qui est tout à fait remarquable, et laisse passer Daniela, nous nous embrassons tout en continuant de courir car je viens d'atteindre enfin les 200 bpm, alors je cours en sortant de l’aéroport, et jusqu’à la voiture et je rentre à 220 km/h en me disant que finalement partir en Bulgarie en retard et sans papier c’est quand même un peu fatigant.  

Partager cet article
Repost0
14 février 2014 5 14 /02 /février /2014 13:35

Ce soir nous sommes invités à diner chez Thomas et Juliette et je me fais une joie un peu molle à l’idée de cette promiscuité d’un soir. Pas que je ne les aime pas, bien au contraire, je suis toujours heureux de retrouver Thomas au détour d’une terrasse ou d’un rayon de supermarché et je ne rechigne pas à tailler le bout de gras, étant de nature locace il ne me laisse que rarement l’occasion de chercher mes mots et me rendre compte que je n’ai, sinon rien, du moins si peu finalement à lui raconter. Quant à Juliette je l’ai bien vu sourire à plusieurs reprises ce qui tendrait à me laisser penser au fond qu’elle doit être empreinte d’une possible joie de vivre non feinte. Bref, nous sommes invités, nous sommes contents et c’est tant mieux. L’heure d’arrivée est fixée à 19h00 et nous sommes, une fois n’est pas coutume, ponctuels. C’est une très belle fin de journée d’été et cette ballade pour aller de chez nous à chez eux m’a mis en appétit et me rend bien-sûr impatient. Je ne l’ai pas dit mais c’est la toute première fois que nous passons délibérément Daniela et moi une soirée complètement organisée avec ce couple d’humains et malgré une aisance caractérisée par un sourire affiché je sens une fébrilité dans ma détermination à appuyer sur le bouton de la sonnette. Daniela me semble plus à l’aise, mais fréquentant nos hôtes d’un soir pour des raisons professionnelles cela lui confère quelques coups d’avance sur moi en la matière. Le bruit sourd des pas de Thomas annonce l’ouverture imminente de la porte devant laquelle nous sommes et je retiens un peu mon souffle sans savoir pourquoi. Nous sommes reçus avec le sourire et une joie non dissimulée. Nous entrons et je m’empresse de me débarrasser des 2 bouteilles de vin et du champagne que nous avons apportés en indiquant que le champagne et le vin blanc sont frais mais qu’il va de soi de les maintenir au réfrigérateur, quant au vin rouge je le verrais bien nous attendre dans un endroit à l’abri de la chaleur encore présente en ce début de soirée. Recommandations faites, nous sommes enjoint à prendre place dans le salon. Je me dis tant mieux et bêtement je me réjouis à l’idée de trinquer à n’importe quoi. L’endroit n’est pas sans charme et nous apprenons que les travaux ne sont pas encore terminés puisqu’il reste la chambre à peindre, le bureau à débarrasser et d’autres bricoles à peaufiner pour faire de cet endroit un vrai petit nid douillet. Comme je suis courtois et bien élevé je souligne l’importance des travaux dans une maison, que moi-même chez moi, que d’ailleurs le papier-peint, et que oui c’est sûr ma bonne dame, et patati et patata… Du coup Thomas nous envoie cette phrase que tout le monde redoute secrètement : « Ah ben tiens ! Je vais vous faire visiter ! » Ca tombe bien puisque Daniela et moi avons un faible pour les visites de pièces-en-travaux-pas-finies-du-tout, et nous enjambons les boites à outils, les cartons, les planches, et trébuchons sur quelques pots de peinture, et on admire le mur qui sera peint en vert à l’automne prochain, et on imagine sans mal la moquette qui devrait arriver la semaine prochaine si tout va bien, et il est 19h45 et j’ai de plus en plus soif bon sang de bois, et la visite des travaux est enfin sur le point de s’achever alors je respire et je pense à une prairie verdoyante sous un ciel bleu pâle, à la douceur du temps qui passe, aux coccinelles, et aux bourdons, oui, aux bons gros bourdons balançant leur popotin de fleurs en fleurs, et je me vois là, une brindille aux lèvres, et la voix de Thomas me dit : « On passe au salon ! » Putain ! Mais un peu qu’on va y aller au salon ! Me dis-je à l’intérieur de moi-même. Nous sommes assis et Juliette apparaît dans la pièce munie d’un plateau sur lequel repose 4 verres et une bouteille de bière Kronenbourg d’une contenance de 75 cl, pose l’ensemble sur la table basse et répartis équitablement le précieux liquide. Je regarde la scène avec beaucoup d’intérêt, d’impatience et un peu d’étonnement puisque sachant que les verres de Juliette ont une capacité de 25 cl, que le volume de bière que Thomas propose est égal à 0,75 litre, que nous sommes 4 dans un salon de 15 m2, que la température au sol est de 29°C, combien temps aura besoin Philippe Maurice pour se rendre compte que 18,75 cl de bière par personne ça fait tout de même très peu. Comme je n’ai même pas mon baccalauréat je me contente de d’essuyer une larme. Il est maintenant 20h30 et nous devisons de choses et d’autres et il me reste un crédit de 8,23 cl de bière tiède dans mon verre lorsque Thomas se lève enfin et se dirige vers la cuisine. Un spasme aux commissures des lèvres trahit ma joie soudaine à voir Thomas, pourquoi pas, avec une seconde bouteille de bière. Mais un second spasme, plus violent celui-là, s’empare de moi lorsque Thomas repasse la porte avec pour seuls bagages un paquet de tabac, des feuilles et un briquet alors j’essuie une autre larme. Il est maintenant 21h00 et nous conversons toujours et j’ai quasiment utilisé tout mon forfait puisqu’il me reste un crédit de 0,42 cl de bière chaude que j’ai du mal à apercevoir dans le fond de mon verre. C’est à ce moment-là que Thomas se lève et nous annonce qu’il va préparer le repas et invite Daniela à l’accompagner en cuisine, me laissant seul, et du coup presque mort, en compagnie de sa femme Juliette. Il est 21h30 lorsque, sans m’en rendre compte, je surprends ma propre langue léchant le fond de mon verre vide, je la rappelle à l’ordre avant que quelqu’un ne s’en rende compte mais j’éprouve les pires difficultés à la détacher. En effet, la conjugaison de la surface polie du verre et de la détermination de la bête dans sa quête de substance aqueuse semble faire l’effet d’une ventouse et il me faut redoubler d’effort et de discrétion pour rétablir le calme pendant que Juliette tente de me convaincre, d’après une thèse selon laquelle tout ce qui existe est de nature physique, de l’importance de la théorie de l’identité qui veut qu’un même état mental peut être identique à plusieurs états physiques différents, ce à quoi je réponds oui madame. Mais Thomas me délivre en nous appelant pour passer à table, alors je bondis et laisse Juliette, sans doute un peu déçue que nous n’approfondissions pas plus cette sombre histoire d’emmenthal physique, mais peu importe, il est temps, bordel de merde, de se mettre quelque chose sous la glotte. Nous nous asseyons autour de la table et constatons avec joie que Thomas est sur le point de commencer à attaquer la préparation de l’entrée, que le poulet rôti n’attend plus que quelqu’un se dévoue pour allumer le four qui va tenter de cuire la défunte volaille, et que Juliette semble vraiment intéressée de savoir ce que je pense de la philosophie quantique à trois dimensions, que nous ne sommes pas prêt d’en finir avec cette étonnante soirée, et je constate également que Daniela parvient sans mal à décrypter le message que mon corps entier n’arrive plus à cacher désormais et qui dit en substance ceci : Mais putain de bordel de merde, y-a-t-il quelqu’un dans cette putain de cuisine qui va enfin me demander si j’ai soif ?!!! Alors Daniela me regarde, se lève et laisse parler tout son génie et son audace en moins de temps qu’il ne faut pour le dire : Bon moi je boirais bien du blanc, toi Philippe tu préfères du rouge et pour le dessert on va boire le champagne mais il faudrait l’ouvrir de suite pour être sûr qu’il ne soit pas trop frais, Thomas, Juliette, ne bougez pas je m’en occupe, tiens, Philippe prend le tire-bouchon et débouche le deux bouteilles et serre-nous à boire s’il te plaît, voilà, allez on trinque ? A la vôtre !

 

Nous avons passé la soirée à manger, à parler de choses diverses et variées, et à boire du vin. Oui, du vin. Je ne me rappelle pas de tous les détails de cette charmante soirée mais je me souviendrai longtemps de ces 25 cl de bière et du temps qu’il m’a fallu pour les boire. Une éternité.

Partager cet article
Repost0
3 janvier 2014 5 03 /01 /janvier /2014 11:12

Quelle est la personnalité de l’année 2013 à Metz ? Cette question est posée par le quotidien régional Le républicain lorrain sous forme de jeu concours avec vote du public et remise des prix… et je crois bien que cette question me rend fou.

A priori je n’ai rien contre ce genre de palmarès qui ne sert à rien. Si ça peut en amuser certains et en divertir d’autres alors pourquoi pas et grand bien leur fasse. Les médias en sont d’ailleurs friands et à tout bout de champs on sollicite la masse populaire afin d’élire le plus beau, le plus intelligent, celui ou celle que l’on préfère. Les choix varient selon les catégories et les genres et les préférences, comme le meilleur chanteur, le meilleur acteur, le meilleur sportif, le meilleur cuisinier, le meilleur pâtissier, ou encore le meilleur journaliste. Tout cela je le comprends et je me dis pourquoi pas, ça ou autre chose, on s’en fout.

Mais aujourd’hui je dois avouer que j’ai beaucoup de mal à me concentrer lorsque j’essaie de départager les candidats en lice tant les critères de sélection pour établir cette liste de onze personnalités m’échappent. J’ai bien essayé de faire des passerelles entre les uns et les autres mais sans succès, et malgré une imagination débordante je n’arrive toujours pas à faire un lien aussi minime soit-il entre un chanteur de télé crochet et un gardien de zoo. Non, vraiment je ne vois rien. Pas même l’ombre d’un lien. Je me suis dit que je devais sans doute manquer de discernement ou tout simplement des connaissances suffisantes ou requises pour participer à ce vote. Faut-il sans doute avoir le petit truc en plus que je n’ai pas et qui me ferait, enfin, voir l’impossible lien. Mais n’étant pas plus bête qu’un autre je dois me calmer, respirer profondémment, relâcher la pression et analyser cette fichue liste. Alors voyons ensemble à quoi ressemblent nos candidats.

1 - Jean-Marie Pelt, directeur du centre européen de l’écologie financé par Metz-Métropole.

2 - Yves Le Chanu, directeur des Transports de l’Aglomération de Metz-Métropole financé par Metz-Métropole.

3 - Michel Louis, patron du zoo d’Amnéville (pas mal, pour une personnalité messine) financé par Metz-Métropole.

4 - Véronique Anatole-Touzet, directrice du CHR de Mercy financé par Metz-Métropole.

5 - Paul-Emile Fourny, directeur de l’opéra-théatre de Metz financé par Metz-Métropole.

6 - Sarah Beurthon, miss Mirabelle dont le comité est financé par Metz-Métropole. (Tiens j’aperçois un lien… Non j’ai rien dis…)

7 - Charline Keck, de Vigy (oui je sais Vigy n’est pas Metz non plus et alors !) Miss Lorraine dont on se fout qui la finance.

8 - Nicolas Turon, artiste et chroniqueur radio des fois un peu drôle et dont on ne sait rien ou si peu.

9 - Philippe Krier, chanteur déchu de l’émission La nouvelle star de M6 (sans commentaire).

10 - Mgr J-C Lagleize (ça ne s’invente pas…), évêque de Metz, personne n’est parfait.

11 - Raphaël Pitti, médecin de guerre et chirurgien, a soigné, opéré, et sauvé des vies au Tchad, dans le Golfe, au Liban, en Syrie notamment à Alep. Il est fondateur d’un centre de formation à la médecine de guerre, sur le terrain à la frontière turque, afin de préparer et mettre en condition des médecins venus de tous pays.

Alors bien sûr, mettre dans la balance en comparant miss Mirabelle et Raphaël Pitti c’est cruel reconnaissons-le, car Mr Pitti n’aura jamais les atouts et le charme vide d’une jeune fille sans joie prête au pire pour la gloire fugace d'une écharpe de satin sans éclat, non jamais. Et non, ces deux-là ne jouent pas dans la même catégorie et ça ne se voit que trop bon sang.  

Mais comment ces imbéciles peuvent-ils établir des listes comparatives tellement dénuées de sens et aussi stupides ? Comment ces journalistes en charge de cette kermesse ont eu la naïveté de penser qu’on pouvait comparer ce qui ne l’est pas. Ces gens me désespèrent. Et si on me demandait de décerner la palme du vide intersidéral journalistique, je n’établirais aucune liste, je ne ferais même pas de palmarès, j’irais droit au but et je la décernerais sans aucune hésitation aux auteurs de cette imposture intellectuelle qui me rend définitivement fou.  

Partager cet article
Repost0